FRA 1003, Histoire de la littérature, 2004-2005

Benoît Melançon, Département d'études françaises, Université de Montréal


Séance du 21 septembre 2004


Questions et commentaires sur la séance du 7 septembre 2004

Retour sur l'interrogation-éclair


I. Quelle est l’histoire de l’histoire de la littérature ? (suite et fin)

Plan

Le plan du début de cette présentation se trouve ici.

2. Le XXe siècle
1. Gustave Lanson (1857-1934), et après
1. L’histoire de la littérature et l’histoire de la civilisation

2. L’histoire de la littérature et son objet

3. L’histoire de la littérature et la méthode scientifique

4. L’histoire de la littérature et la sociologie

5. L’histoire de la littérature et ses savoirs

6. L’histoire de la littérature et l’impressionnisme

7. Sa fortune

2. La crise structuraliste

3. Aujourd’hui

1. La persistance de l’histoire de la littérature

2. Le succès de l’histoire

3. De nouvelles techniques

4. De nouvelles approches

5. De nouveaux objets

«Le XVe siècle continue et développe les caractères du XIVe : épuisement, dissolution, ou monstrueuse déviation des principes vitaux du moyen âge, intermittente et comme inquiète éclosion de quelques bourgeons nouveaux, effort incomplet et encore entravé des formes futures vers la vie.

1. Charles d’Orléans

Les premières années du règne de Charles VII appartiennent surtout au groupe des humanistes qui commencent à épeler avec un accent nouveau les auteurs tant de fois compilés et cités par le pédantisme des siècles précédents. Ne nous arrêtons pas à l’excellente Christine Pisan, bonne fille, bonne épouse, bonne mère, du reste un des plus authentiques bas-bleus [une pédante] qu’il y ait dans notre littérature, la première de cette insupportable lignée de femmes auteurs, à qui nul ouvrage sur aucun sujet ne coûte, et qui pendant toute la vie que Dieu leur prête, n’ont affaire que de multiplier les preuves de leur infatigable facilité, égale à leur universelle médiocrité. Il faut l’estimer, étant Italienne, d’avoir eu le cœur français, et d’avoir rendu un dévouement sincère et désintéressé aux rois et au pays dont longtemps les bienfaits l’avaient nourrie; le cas n’est pas si fréquent. Elle y a gagné du reste d’avoir écrit dans de beaux élans d’affection émue cinq ou six strophes ou pages qui méritent de vivre. Cette Italienne qui sait le latin a quelque souci de la phrase, et quelque sentiment des beaux développements largement étoffés» (Gustave Lanson, «Le quinzième siècle (1420-1515)», dans  Histoire de la littérature française, Paris, Librairie Hachette, 1912 (douzième édition revue), xviii/1204 p., p. 166-167 [UDM / BLSH / 840.9 / L295h / 1912]).

Conclusion


II. Qu’est-ce qu’un auteur en histoire de la littérature ?

Plan

Introduction

Michel Foucault (1926-1984)
«Je les résumerai [les caractéristiques de la fonction-auteur] ainsi : la fonction-auteur est liée au système juridique et institutionnel qui enserre, détermine, articule l'univers des discours; elle ne s'exerce pas uniformément et de la même façon sur tous les discours, à toutes les époques et dans toutes les formes de civilisation; elle n'est pas définie par l'attribution spontanée d'un discours à son producteur, mais par une série d'opérations spécifiques et complexes; elle ne renvoie pas purement et simplement à un individu réel, elle peut donner lieu simultanément à plusieurs ego, à plusieurs positions-sujets que des classes différentes d'individus peuvent venir occuper» (Michel Foucault, «Qu'est-ce qu'un auteur ?», Bulletin de la Société française de philosophie, 63, 3, juillet-septembre 1969, p. 73-104, repris dans Dits et écrits 1954-1988. I. 1954-1969, édition établie sous la direction de Daniel Defert et François Ewald avec la collaboration de Jacques Lagrange, Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque des sciences humaines», 1994, p. 789-821 [UDM / BLSH/ B 2430 / F723 / D58 / 1994] et partiellement dans l'Auteur, introduction, choix de textes, commentaires, vade-mecum et bibliographie par Alain Brunn, Paris, GF Flammarion, coll. «GF. Corpus. Lettres», 3058, 2001, p. 75-82, p. 82).
Première proposition — On ne naît pas écrivain, on le devient.

Deuxième proposition — Un écrivain n’est jamais seul au monde.

Albert Thibaudet (1874-1936)
«Le concept d’une génération littéraire implique le classement des auteurs d’une littérature selon leur date de naissance plutôt que selon leur période d’activité littéraire, très variable de toute façon. […] Par ailleurs, le regroupement d’après la naissance a l’avantage insigne de reposer sur un fait précis susceptible de vérification documentaire, et de partir d’une compilation relativement objective, à savoir la préparation de listes de tous les auteurs connus d’une littérature. L’étudiant arrive ainsi à rassembler en de petits groupes des auteurs nés à la même époque, ayant subi en même temps les mêmes influences politiques et sociales, et ayant connu dans la plupart des cas une formation commune. Il est du reste loisible de rapprocher ces auteurs de leurs contemporains ayant œuvré dans d’autres domaines d’activité intellectuelle ou artistique, notamment dans celui des beaux-arts. Enfin, le classement par date de naissance permet de grouper des écrivains à des intervalles de quelques années, de façon à faire ressortir les ressemblances et les contrastes : rien ne s’oppose à ce que, selon ce modèle, plusieurs courants contradictoires se juxtaposent à une même époque. L’historien de la littérature se libère par conséquent de la camisole de force que lui impose la périodisation traditionnelle conçue en fonction de siècles ou de mouvements monolithiques» (Hayne, David M., «Les générations littéraires au Canada français : une tentative de périodisation», dans Mélanges de civilisation canadienne-française offerts au professeur Paul Wyczynski, Ottawa, Éditions de l’Université d’Ottawa, coll. «Cahiers du Centre de recherche en civilisation canadienne-française», 10, 1977, p. 114 [UDM / BLSH / FC / 132 / M45]).
Troisième proposition — La vie de l’auteur est objet de récit.
1. Récit biographique et sélection
La prémonition du talent

La comparaison «classante»

L’appartenance historique

2. La lecture du récit biographique

3. Récit biographique et œuvre

Quatrième proposition — L'histoire de la littérature contemporaine se méfie de l'auteur.

Conclusion

«Quand nous ne connaissons pas le nom d’un auteur, nous commençons par nous méfier; et par nous affoler; nous nous inquiétons; nous courons aux renseignements; nous nous trouvons ignorants; nous sommes inquiets; nous demandons à droite et à gauche; nous perdons notre temps; nous courons aux dictionnaires, aux manuels, ou à ces hommes qui sont eux-mêmes des dictionnaires et des manuels, ambulants; et nous ne retrouvons la paix de l’âme qu’après que nous avons établi de l’auteur, dans le plus grand détail, une bonne biographie cataloguée analytique sommaire» (Charles Péguy, «Zangwill», Cahiers de la quinzaine, 6, 3, 25 octobre 1904, cité dans Robert Melançon, Élisabeth Nardout-Lafarge et Stéphane Vachon (édit.), le Portatif d’histoire littéraire, Montréal, Université de Montréal, Département d’études françaises, coll. «Paragraphes», 15, 1998, p. 226 [UDM / BLSH / PÉR]).



III. Le Moyen Âge


Les documents pédagogiques utilisés en classe se trouvent ici.


Plan

Introduction

1. Découpage chronologique
 

a. Les limites chronologiques du Moyen Âge historique

b. Les limites chronologiques du Moyen Âge littéraire


2. Les français médiévaux
 

a. L'absence d'unité linguistique en Europe

b. La pluralité linguistique médiévale en Europe (voir ci-dessous)

c. La situation française
 

Le plus ancien français (du IXe siècle au XIIe siècle)

L'ancien français «classique» (le XIIe siècle et le XIIIe siècle)

Le moyen français (le XIVe siècle et le XVe siècle)

d. Deux définitions — la géographie des langues en France
Langue d'oïl

Langue d'oc


3. La littérature médiévale

«La conception même des buts du poète, généralement décrit comme un humble artisan au service de son Créateur, l’anonymat habituel de la création littéraire, le “communisme” coutumier des thèmes et des formes qui montre que l’on ne donnait de valeur ni à l’originalité, ni à l’individualité, l’absence de considération pour l’historicité des événements, tous ces symptômes parallèles de la mentalité médiévale expliquent l’absence d’une histoire littéraire proprement dite» (René Wellek, The Rise of English Literary History, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 1941, vii/275 p., cité dans Robert Escarpit, «Histoire de l’histoire de la littérature», dans Raymond Queneau (édit.), Histoire des littératures. III. Littératures françaises, connexes et marginales, Paris, Gallimard, coll. «Encyclopédie de la Pléiade», 7, 1978 (nouvelle édition), p. 1747-1826, p. 1769 [UDM / BLSH / PN 543 / H56 / Consultation interne]).

a. Les «buts du poète» (=Wellek)

b. L'anonymat de la création (=Wellek)

c. Le «communisme» des thèmes et formes (=Wellek)

d. Le statut marginal de l'histoire (=Wellek)

e. Les effets d'oralité (*Wellek)

1. Oralité et chanson

2. Oralité et vers

3. Oralité et prose

«Ici finit le roman de Tristan et Iseult. À tous les amants, le conteur adresse son salut : aux rêveurs, aux enamourés, aux jaloux, à tous ceux que mord le désir, aux enjoués, aux éperdus, à tous ceux qui liront cette histoire ! Si je n'ai dit à tous ce qu'ils eussent souhaité, je l'ai dit du moins le mieux que j'ai pu et j'ai dit la vérité pure autant que j'ai pu la connaître. J'ai un peu retranché du récit; ce que j'ai conservé, je l'ai choisi pour illustrer et embellir cette histoire afin qu'elle plaise aux amants et qu'ils y trouvent de quoi se verser au coeur quelque délice. Puissent-ils en avoir réconfort contre les trahisons, contre les torts, contre les peines, contre les larmes, contre tous les chagrins d'amour !» (Tristan et Iseult, renouvelé en français moderne d'après les textes des XIIe et XIIIe siècles par René Louis, Paris, Libraire générale française, coll. «Le livre de poche», 1306, 1972, xvi/304 p., p. 249, excipit.)


4. Oralité et écoute

«La situation d’écoute se caractérise par un triple niveau de contraintes : a) l’auditeur n’a pas la possibilité de déterminer le moment de la communication; b) il n’en maîtrise pas le débit, prisonnier qu’il est du rythme du conteur; c) en matière d’accès au contenu, il n’a aucune possibilité de retourner en arrière afin de sélectionner, dans un récit déjà connu, la séquence qui l’intéresse particulièrement : il doit suivre le fil, irrémédiablement linéaire parce qu’inscrit dans le temps, de la récitation qui en est faite» (Christian Vandendorpe, Du papyrus à l’hypertexte. Essai sur les mutations du texte et de la lecture, Montréal, Boréal, 1999, 271 p., p. 15 [UDM / EBSI / P 211 / V36 / 1999]).
f. Le système des genres (*Wellek)

g. L'absence de cadres nationaux en littérature (*Wellek)


4. Le Moyen Âge est lui-même un objet historique

a. Un objet construit

b. Des textes redécouverts (dimension éditoriale)

c. Le rôle des écrivains (dimension littéraire)

d. Le rôle de l’Université (dimension institutionnelle)


Le contact des langues

Le colinguisme
 

Il s'agit du contact de langues écrites.

Ex. : Balibar, Renée, Histoire de la littérature française, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», 2601, 1993 (deuxième édition corrigée), 127 p. [UDM / BLSH / PQ 101 / B35 / 1991]

Le bilinguisme
 
Il y aurait eu un bilinguisme vertical :
 
le latin et les langues vulgaires.


Il y aurait eu un bilinguisme horizontal :
 

entre les langues vulgaires.


Ex. : Zumthor, Paul, Langue et techniques poétiques à l'époque romane (XIe-XIIIe siècles), Paris, Klincksieck, coll. «Bibliothèque française et romane. Série C, Études littéraires», 4, 1963, 224 p. [UDM / BLSH / 841.04 / Z94l]

Le plurilinguisme
 
Le plurilinguisme serait fait d'une série de bilinguismes.

Cela permettrait de distinguer
 

le bilinguisme littéraire — un auteur écrit en plusieurs langues —,

le bilinguisme poétique — un même texte accueille des langues diverses —

et le bilinguisme référentiaire — les rapports entre les langues dépendent du prestige des langues.


Ex. : Grutman, Rainier, «Le système triplement bilingue de la lyrique occitane (1150-1250)», Revue des langues romanes, 98, 2, 1994, p. 465-475. [UDM / BLSH / PÉR]

L'hétérolinguisme
 
On sortirait ici de la seule série littéraire.

Ex. : Grutman, Rainier, Des langues qui résonnent. L’hétérolinguisme au XIXe siècle québécois, Montréal, Fides — CÉTUQ, coll. «Nouvelles études québécoises», 1997, 222 p. [UDM / BLSH / PS 8131 / Q4 / G78 / 1997]


Le mixtilinguisme

Ex. : Bem, Jeanne et Albert Hudlett (édit.), Écrire aux confins des langues. Actes du Colloque de Mulhouse (30, 31 janvier et 1er février 1997), Mulhouse, Université de Haute-Alsace, Centre de recherche sur l’Europe littéraire (CREL), coll. «Créliana», hors série I, automne 2001, 206 p. Ill.

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