(2 avril) Consolidation ou démocratique Vs restauration autoritaire : études de cas Patrice Éméry
Bakong (2ème rapport de lecture) |
Synthèse
de l’article |
Synthèse
de l’article
Comme
son titre l’indique, l’article de
Gyimah-Boadi traite du changement qui est survenu à la tête de l’État
ghanéen à la suite des deux tours de l’élection présidentielle de Décembre
2000. Un changement qui a été salué à la fois par la communauté
nationale et internationale du fait, comme le dit l’article, de son
caractère pacifique et surtout inédit. En traitant de ce changement,
l’auteur cherchait en fait à nous prouver que l’on peut désormais
parler de consolidation de la démocratie dans ce pays. Telle est la
principale idée qui sou tend cet
article, montrer que la phase de transition
est passée, et que l’on est désormais entré dans l’ère de la
consolidation. Trois arguments viennent meubler cette hypothèse. Le
premier d’entre tous est le respect par le président sortant, le
Lieutenant jerry Rawlings, de la constitution qui lui intimait l’ordre
de quitter le pouvoir à la fin de son deuxième mandat. En effet, après
avoir été élu en 1992 et 1996, Rawlings ne pouvait prétendre à un
troisième mandat en 2000, puisque la loi fondamentale de la quatrième République
ghanéenne le lui interdisait. Et sans résistance aucune, ce dernier
n’a pas été candidat à sa propre succession, signe d’une victoire
des forces démocratiques et d’un enracinement de celles-ci dans le
pays. Le
deuxième argument, et de loin le plus important, est l’alternance
survenue au sommet de l’État. Certes,
Rawlings n’était pas candidat à sa propre succession mais son parti,
le National Democratic
Congress
(NDC) l’était. Tout laissait penser
que le NDC allait rester au pouvoir . Mais non, John Atta Mill, le
poulain de Rawlings, a été battu au
second tour de l’élection, provocant ainsi une alternance par la voie
des urnes. Le
troisième et dernier argument qui atteste de la consolidation de la démocratie
au Ghana découle du deuxième. Il s’agit de l’absence
de contestation au terme du processus
électoral. Les deux partis ont reconnu la victoire du candidat de
l’opposition John Kufour et ni l’armée, ni la population ne sont
intervenues pour régler un quelconque contentieux électoral comme ce fut
le cas dans certains pays. Le verdict des urnes a été respecté et la
transition à la tête de l’État s’est déroulée sans dommages. Les
raisons de ce succès tiennent elles aussi à trois principales raisons
selon Gyimah-Boadi. 1-
L’implication de la société civile. Tout au long du
processus, celle-ci est intervenue de diverses manières pour rendre l’élection
2000 ‘fair and free’. Les groupes religieux ont rendu le processus
pacifique en prônant la non-violence; des
associations indépendantes ont scruté la quasi totalité des
bureaux de vote pour rendre le scrutin plus transparent. Les médias ont
éduqué la population et celle ci a pu bénéficier d’une bonne
couverture médiatique du scrutin, ce qui leur a permis de mieux élaborer
leur choix. Il n’est pas jusqu’aux musiciens qui n’aient apporté
leur pierre à l’édification de la démocratie au Ghana. En somme
l’implication de toutes les couches de la société a largement contribué
à rendre le processus plus attrayant. 2-
La sollicitude des acteurs étrangers et autres bailleurs de fonds
a également été d’un
grand support pour l’élection ghanéenne. Selon Boadi, l’on ne
saurait négliger les sommes versées par l’union Européenne, Les États-Unis
ou le Canada; l’assistance
technique apportée par des organismes oeuvrant pour le compte de ces pays
(USAID,CIDA, DANIADA) ou encore l’appui moral des personnes comme
Clinton, Mandela ou Élisabeth II. 3-
Le mode de transition constitue également une raison importante du
processus de consolidation de la démocratie au Ghana. Selon l’auteur,
«la transition par pacte» qui a eu lieu dans ce pays a permis de se débarrasser des anciennes autorités en réduisant
les risques de violence qui tendent souvent à accompagner les transition
en Afrique. Toutefois,
malgré le sentiment de libération qui a envahi les Ghanéens au
lendemain du succès de l’élection de 2000, l’auteur de cet article
nous montre que tout n’a pas été rose. De grands problèmes ont miné
la campagne électorale, ce qui a réduit considérablement
certains acquis démocratiques que l’on avait pus enregistrer
depuis l’avènement de la Quatrième République.
-
Les problèmes économiques et la pauvreté de la population constituent
l’un de ces handicaps. -
Les manipulations ethniques qui conduisent à la division du pays ne
permettent pas un vote raisonnable mais plutôt motivé par des considérations
émotionnelles. -
Les pratiques néo-patrimoniales qui
poussent le pouvoir en place à utiliser les ressources de l’État à
son profit sont une preuve d’injustice puisqu’ils donnent plus de
moyens aux autorités en place qu’à l’opposition dans la conduite de
la campagne électorale. -
Les menaces et autres intimidations, qu’elles proviennent de l’armée,
de la population ou encore des partis en lice ont émaillé la campagne électorale
réduisant ainsi son caractère ‘fair and
free’. Pour
conclure son texte, Gyimah-Boadi nous ressort les défis qui attendent les
nouveau régime. Le premier de ces défis est d’ordre économique. Il
est vrai que la réaction des bailleurs de fonds a été presque positive
après l’élection de 2000. Mais l’équipe de John Kufour se doit de
faire beaucoup d’efforts pour relever le niveau de vie des Ghanéens
afin d’éviter des problèmes sociaux, sources de conflits. Le
deuxième de ces défis est la restructuration de l’armée et surtout
des services de sécurité de l’ancien homme fort d’Accra, jerry
Rawlings. Le
troisième et le plus
important de tous est selon l’auteur, la réconciliation nationale.
Plusieurs torts ont été causés aux populations
depuis l’indépendance du pays et on constate la présence d’un
certain ressentiment au sein de certaines couches sociales, ressentiment
qui devrait être dissipé. L’auteur
demande de ne pas oublier le problème du statut et des indemnités à
accorder aux anciens chefs de l’État. Critique
Globalement,
nous pouvons dire que «A peaceful
turnover in Ghana»
est un texte intéressant et riche en informations. Toutefois, nous avons
déploré son caractère beaucoup plus descriptif
qu’analytique. La critique principale que nous pouvons adresser à Boadi est sa propension à crier très vite victoire. Certes, le Ghana a avancé considérablement sur la voie de la démocratie. Il a pu traverser plusieurs étapes difficiles, mais la consolidation ne peut être considérée à l’heure actuelle comme acquise. Certes qu’il y a eu trois élections pluralistes et une alternance pacifique. Mais le Ghana n’a jusqu’à présent pas encore été confronté à une grande crise constitutionnelle à la malgache. L’avènement d’une telle crise, et la façon de la gérer pourront nous conduire à parler ou non de consolidation démocratique dans ce pays.
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